D'un pas incertain, je chemine sur le fil du Temps tel un funambule avide qui crie à un croissant de Lune :
- Hé, es-tu comestible ?
- Que nenni, mon cœur est de marbre ! Manges-tu le marbre ?
La rigueur du tic-tac de l'horloge laisse place au frottement doucereux de mes pas maladroits sur le fil. Schissh-schussh. La marche du Temps se synchronise sur chaque conquête malhabile d'un de mes pas.
Tel un enfant de Chronos livré prématurément aux acrobaties du Temps, j'apprends les lois des pas de danse et leurs résonances sur le Temps. La Lune m'interpelle entre-deux entrechats :
- Daignerais-tu répondre ?
- Bordel, NON !
- Pourquoi donc cet emportement pour une simple question ?
- Car ton cœur est de marbre !
Sur ces entre-faits, que nul ici n'a expérimenté, la Lune, un tantinet vexée, se tourne et va au chevet de son cœur de marbre.
Tel un géant fait de glaise, je marche d'un pas fort aise cadençant des millions de vie.
Telle une araignée faite de neige, je fonds aussi sous la Lune.
De fil en aiguille en conversant avec les étoiles, j'atteins la Fin du fil du Temps et dans un épais manteau couvert de rêves, je saute poliment vers le gouffre après la Fin et flotte dans une musique orgiaque vers ma toute dernière envie : un éternel repos.