Traverse de la jeunesse
Je descends une ruelle faite de murs au goût caramel. Celui de l'enfance sucrée.
Je bifurque porté par une bulle de savon m'emmenant dans l'impasse du bonheur. Je fais
demi-tour sur une planche à roulettes. Je me balance en écoutant le vent siffler dans les feuilles
d'un majestueux saule. Je monte si haut dans le ciel. Et tombe si bas.
Je câline les branches du saule en m'inventant milles glissades de mes doigts sur leurs feuilles.
Je suis leurs nervures qui crayonnent à leurs tempos toutes les secondes qu'égrènent mes mains.
Je repars l'air hagard dans une des ruelles aux murs caramélisés sous les chaleurs adolescentes. Je découvre les désirs pressants des dures raideurs de la tendre chair. Je m'aventure dans des nefs de vie en suivant la route du mont de Vénus. Pour les premières fois. Je pleure des larmes lisses forgées dans les horreurs passées sur des peaux inconnues de plaisantes demoiselles, si belles. Je multiplie les amours d'une indolente
passion. Et en chute, dolent. Plus grand.
Traverse de sa propre histoire
Je suis un passager de ma propre histoire, voletant de bulles en bullettes, marchant de rues en ruelles. Je me répands d'orgasmes sur la peau de ma mémoire, me surprends de loin, me scrute de près et m'éternise sur une fugace réminiscence. Je flambe des berceaux adoptant les mornes temps, je transpire sur l'instant des petits bonheurs d'antan. Je me hisse sur le mat des heures passées, me déporte sur les voiles de l'instant et me transporte sur les brises du futur.
Traverse des fuites d'amour
Je danse sur un pied et fuis sur un temps. Je sabre des yeux d'indicibles passagères du
vent sombrant d'une paisible torpeur loin de mes rancœurs.
Je suis fuyant vers l'extase.
Je suis une présence, absente.
Elles sont les confidentes du soleil. Elles s'ombragent de mes douleurs. Elles sont les dansantes passantes du ciel. Elles tanguent d'une nuit de douceur. Elles sont, tout simplement.
Je suis une larme de sang serpentant sous vos peaux, se glissant dans vos os. Je me dissous
dans vos cœurs valsant répétitivement vos vies. Bom Bombom.
Dansent les passagers des nuages, dansent.
Crient les voyageurs d'entre les heures, crient.
Aiment les danseurs sous la pluie de larmes, aiment.
Disparaître, seuls.
Traverse des brisures
Je suis une lézarde habillée de vert dans le mur de sel séché cachant la mer. Chaque obus reçu sur mes chantants instants défonce mes alentours, effondre mes atours. Je suis le résultat du ravage. Je suis un délicat carnage carnassier. Je suis une maison sans plus aucune fondation. Je suis un immeuble sans assise.
Je suis une pâte brisée qu'un rouleau a écrabouillé.
Suis-je ?
Traverse de la folie
Je passe sous la voûte de l’antre de la folie. Un plat pays sans vie. Un espace aux denses nuits sans torpeurs. Une maison écroulée d'une moitié. L'arc est un soubassement orné des visages rencontrés aux formes déchirées. Ils parlent de sons sifflants.
Je suis soumis aux désirs extatiques des affres d'autrefois. Je suis une rigueur qui perdure en largeur. Je suis le souffle exaspérant du temps. Je suis le dessin vaporeux devant vos yeux. Je danse. Je danse loin de mon corps. Je suis terni, affaibli.
Je suis l'ombre d'un spectre. Je suis le tréteau que forme encore mes os. Je suis un instant durable. Je suis une rumeur persistante du temps. Je suis une soumission fatale. Je suis un déglutissement stridulant, riant et giclant. Une trace sur l'horloge fissurant le temps. Je suis une ébauche.
Traverse du renouveau
Je suis le chemin de marbre du retour à la vie. J'applaudis des deux mains.
Je serpente sur le devant du temps. Je suis un cerveau malade qui baise son convive reptilien.
Je danse sur le lac en tempête des souvenirs fébriles. Et je vous emmerde. J'aime m'y baigner. Je le déteste. Je suis un vaisseau nidifiant d'images surfaites. Mes gestes, mes mots ne pourront suivre le fil vibrant de ma pensée. Un tendre instant de repos arrive. Loin de vos bras, mesdames. Loin de vos vies à vous tous.
Je porte le ciel à bout de bras. Je plonge mes mains dans les nuages qui en dégoulinent des larmes de joie. Je place lune et soleil dans l'incommensurable olympe. Je soupèse les étoiles et les jettent sur une toile marine. Je règle leurs lueurs d'un coup de curseur. Je peins le paysage de vos nuits. Je dessine mon futur des foules hurlantes aux cents et unes formes dansantes sur un tableau blanc émouvant.
Traverse des adultes
Je suis l'onde de la vie, je suis un écho de l'espoir, …, poir, poir errant et dormant sous le joug de la pluie assassine de tremblotants moments.
Je m'assois entre le mouvement des danses des ecclésiastes, entre les pas de Dieu.
Je suis une rédaction sur ta peau qui t’entreprend, tendrement.
Tournes les pages en suivant le fil tranchant de la feuille, ses nervures courbes aux inflexions
malignes.
Respires le vent, écueil des voix d'autres temps.
Caresses d'un égard dédaigneux les risées surchargées de l'histoire.
Touches chaque virevolte du profond chagrin de notre faim…du commencement.
Suis, avare, de l'extrémité de tes doigts les happements des délices imaginaires de nos chairs se rejoignant dans un calice de soie dorée et orné des fresques fantasmées de nos timides ébats.
Piailles l'enfant, l'enfant sage.
Rugis, rugis le lion en cage.
Fissures les murs, les barreaux enchaînant nos corps.
Dessines des morceaux de nuits d’Éros sur les rayons de lumière jaune.
Épanches de milles égards d'attendrissantes damoiselles aux senteurs florales.
Ici gît l’accalmie, repue et détendue.