L'appartement est secoué par des inconnus qui en explorent tous les recoins pendant que son propriétaire rêve en filigrane cette réalité travestie. Une vie intense et inconnue fait intrusion en ce lieu comme si elle était en pays conquis. Les éclats de voix, le battement des portes n'affectent en rien les rêves du propriétaire. Il vit suspendu à un nuage en attendant le baiser d'un ange. Son monde interne s'affole de cette attente. L'appartement s'emplit de vie pendant qu'il s'en éloigne, il suit le lit de ses rêves qui est loin d'être asséché. Il l'arpente avec rigueur et une apaisante douleur. Il s'éloigne, lentement, pas à pas, de ce monde emplissant son logement pour s'asservir à la petite mort de l'esprit. Et l'ange ne vient pas et le nuage s'effiloche …
Le soleil de l'été irradie sa moitié de Terre quand le réveil sonne.
Le réel s'annonce en fanfare, immaculé des traces de la nuit.
L'appartement est vide, rien n'a bougé.
Mais où sont donc les intrus noctambules et les traces de leurs agissements ?
L'appartement est dans le même état que à l'heure du couché, meublé de manière spartiate où le détournement de la finalité des brics et des brocs règne. Un sac en guise de lampadaire se détourne du regard de son créateur, en signe d'indépendance. Une fourchette négligemment posée sur le sol hurle son désir d'être un couteau. Quelle idée pour une fourchette …
Un crissement de robinet s'enfuit pendant qu'une eau aérée s'annonce. Elle s'écoule avec vigueur à la recherche d'une échappatoire à la gravité, en vain … Les bruits métalliques et froids de la ville emplissent l'air pendant que l'eau renonce à échapper à la gravité. Les chaleurs de l'été font perler une étendue disparate d'eau salée sur les habitants mais elle reste trop petite pour qu'on puisse s'y baigner. Une serviette se cache sous une autre pour tenter de s'affranchir de sa corvée hebdomadaire.
Toujours aucune trace de nos invités surprises. Une web radio régurgite sa liste de lecture par les enceintes, qui n'en sont pas forte aise, couvrant les sons urbains. Un écran d'ordinateur affiche cette histoire, personne n'est devant pour la lire.